Premières Rencontres de l'Isoc Wallonie, Namur, 17 juin 2000
Le chapitre Wallonie de l'Isoc :
en phase étroite avec le projet de société
dont le Contrat d'Avenir a doté la Wallonie
Jean-Claude Van Cauwenberghe
Ministre-président du Gouvernement wallon
http://gov.wallonie.be/gov/min/m_vancau.htmlMesdames, Messieurs,
Integrating knowledge society : c'est ainsi que les Anglo-saxons dénomment donc ce que nous appelons, nous aussi, par un néologisme fabriqué à la hâte, "la société intégrative de la connaissance".
Solennisé au sommet de Lisbonne, qui matérialisait ainsi dans la réalité politique une pratique déjà consacrée par un usage croissant. Ce concept appelle chaque partenaire européen à soutenir et à promouvoir les technologies de l'information et de la communication auprès du citoyen et des institutions.
Ce n'est donc pas par hasard si, anticipativement, le Contrat d'avenir pour la Wallonie a fait de la société de la connaissance une des priorités essentielles de développement.
Bien entendu, la société de la connaissance dépasse le simple cadre de l'utilisation d'Internet.
Les nouvelles technologies des matériaux, les biotechnologies, les centres de recherche et de développement, ... sont autant d'éléments qui, avec l'apprentissage des nouveaux outils de communication et d'information, constitueront le cur de la société de la connaissance wallonne de demain, moteur de développement régional.
Dans ce cadre, le fonctionnement en réseau de l'économie, des institutions, des acteurs régionaux sera favorisé dans le but de promouvoir l'accès à la connaissance, de simplifier les procédures et les obstacles administratifs et de faciliter le développement d'une économie structurante et productive, au bénéfice de tous.
Au bénéfice de tous, nous y serons très attentifs car nous voulons à tout prix, comme vous, que la société de la connaissance ne soit pas un vecteur de dualisation des Wallons.
Le gouvernement a déjà entrepris un certain nombre de mesures qui vont dans ce sens.
Le réseau d'équipement des écoles wallonnes et germanophones, appelé "Cyber Ecole", sera poursuivi et pérennisé.
Les projets innovants visant à démocratiser l'accès aux technologies de l'information, tout en privilégiant la qualité du service offert, seront soutenus : des guichets Internet, des espaces citoyens, des bornes interactives sont des pistes qui, de plus en plus, cessent d'être expérimentales.
Le gouvernement wallon entend continuer à former le personnel régional et communal à ces nouvelles technologies et à développer un intranet, non seulement au sein de la commune mais aussi envers les communes et la Région.
Des sites seront inaugurés à tous les niveaux de pouvoir afin que des informations sur les services, les procédures, les possibilités de commande électronique de documents, les liens avec des sites d'autres institutions ou d'autres organismes publics, soient disponibles à tous.
De la même manière, le gouvernement se montre attentif à favoriser dans les entreprises les démarches d'e-business et d'e-commerce, en particulier dans les PME.
Il veille aussi à encourager le raccordement de ses zonings économiques aux réseaux de fibres optiques.
L'expansion des réseaux de fibres optiques dans les universités devra également permettre à court terme la création d'un intranet interuniversitaire wallon.
Mesdames, Messieurs,
Penchons-nous un moment sur la nature même de l'Internet Society et de son chapitre wallon dont finalement nous écrivons ensemble ce matin une des premières pages.
Créé en 1998, le chapitre Wallonie de l'Isoc rassemble des personnalités interdisciplinaires issues de tous les milieux philosophiques et sociaux de Wallonie, et au rang desquels on retrouve - et je m'en félicite - plusieurs représentants du Ministère de la Région wallonne.
Parmi les objectifs et la méthode que poursuit l'Isoc, je voudrais relever certains aspects qui me tiennent plus particulièrement à cur :
- J'ai déjà évoqué l'importance de favoriser l'accès à l'internet au plus grand nombre. C'est un aspect très présent dans le Contrat d'Avenir pour la Wallonie;
- Je note ensuite la volonté de respect de la démocratie et de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Facteur essentiel s'il en est, il ne demeure pas moins important de le rappeler lorsqu'on évoque un phénomène à la dimension planétaire.
Il faut renforcer les mesures de filtrage des sites violant la moralité publique et les bonnes murs, tant par le langage, que par l'image ou la violence du contenu;
- Je suis également sensible à la promotion de notre Région, à la Francité et au développement harmonieux des différentes cultures dans le monde par le biais de l'internet, en renforçant la présence de la langue française sur les sites, en collaboration avec les chapitres utilisant le français;
- Enfin, comment ne pas se montrer satisfait de la place que vous réservez dans vos travaux à la construction d'une nouvelle citoyenneté participative, nourrie d'une relation démocratique entre les citoyens de l'internet.
Un tel programme ne peut que retenir l'attention du gouvernement wallon, qui portera à vos travaux, tout l'intérêt qu'ils méritent.
Votre méthode, qui favorise l'attitude critique et l'approche des problèmes en réseau, est par ailleurs une garantie de sérieux et une promesse de réussite.
Il ne faut donc pas être "grand clerc en télécommunication" pour comprendre que le chapitre Wallonie de l'Isoc est en phase étroite avec le projet de société dont le Contrat d'Avenir a doté la Wallonie. Il est en phase par son contenu et par son analyse critique.
Les événements (forums, conférences, congrès, ...) illustrant les objectifs du chapitre Wallonie de l'Isoc devront nécessairement constituer un matériau riche d'analyses critiques de l'utilisation de l'internet.
Je fonde beaucoup d'espoir sur les conclusions et les analyses de vos travaux, qu'elles se fassent sous forme de recommandations ou de mémorandum.
Mesdames, Messieurs,
Les premières rencontres de l'Isoc Wallonie se déroulent sur un thème fondamental : Education, cultures et internet, Enjeux, stratégies et développement durable.
Trois ateliers pour débattre. Permettez-moi un commentaire à leur sujet.
1. L'enseignement à distance, tout d'abord.
Comme c'est déjà le cas aux Etats-Unis, nos universités sont appelées à développer une offre concurrentielle en matière de formation continue et de formation à temps partiel.
Cette nouvelle manière de dispenser des cours devrait générer de nouvelles relations entre les acteurs de la formation, étudiants et enseignants, une plus grande implication des apprenants dans la formation, une pédagogie différenciée et aussi une autre manière de gérer le temps et l'étude.
Il serait donc intéressant pour tous les participants de cette rencontre et pour les pouvoirs publics de voir, à l'issue de cette réflexion, quelles pistes s'offrent à la Wallonie pour regrouper des services qui, du point de vue économique, scientifique, technologique, social et pédagogique permettront aux PME et aux écoles, non seulement d'avoir accès au bénéfice de l'EAD par l'internet, mais surtout de devenir, comme on le dit dans ce langage des TIC (Technologies de l'Information et de la Communication), des "offreurs de service".
2. Ensuite, l'atelier baptisé Cultures et langues de l'internet
Il apparaît nécessaire de s'interroger sur les impasses auxquelles peuvent conduire, pour les langues et cultures minoritaires, le modèle actuellement dominant de l'internet, marqué par l'omniprésence de la langue anglaise.
Il en va du devenir et de la diversité de la pensée européenne dans ce qu'elle a de plus précieux : la pluralité des normes et des formes, la communion des héritages et de la mémoire, la recherche de l'égalité au delà des divergences, l'élan vers un avenir commun modelé par les hommes et non par les machines.
Quels sont les projets d'envergure qui seront à concevoir au niveau des régions, des Etats, de l'Europe et, plus largement, au plan de la coopération internationale, pour que l'internet devienne un vercteur de fertilisation croisée et de circulation accrue des idées entre les cultures du monde et non l'instrument de domination d'une culture sur les autres.
3. Enfin, un dernier atelier s'attachera à la liberté d'expression et à la gouvernance de l'internet. Last but not least, faut-il le préciser !
Depuis sa création, le réseau Internet se présente comme une synthèse ouverte à tous, destiné à accélérer l'accès et l'échange d'informations de toute nature et sous toutes les formes (multimédia).
Fondé essentiellement sur l'idée d'échange permanent entre l'ensemble de ses participants, le réseau fonctionne sur base de règles simples, minimalistes, qui cadrent l'initiative individuelle et veillent à équilibrer le fonctionnement de l'ensemble et les apports de chaque participant.
Comment ces règles sont-elles édictées, suivies, contrôlées ?
Au delà du comportement du "bon père de famille" que la plus grande majorité des utilisateurs de l'internet adoptent, diverses entités interviennent actuellement et à titre principal dans la gouvernance de la toile.
Soulignons plus particulièrement le rôle de deux d'entre elles.
- L'ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers, http://www.icann.org) est l'organisation qui a été formée en octobre 1998 pour prendre la responsabilité de l'attribution spatiale des adresses Internet Protocole (IP), de l'assignation des paramètre protocolaires de la gestion des noms de domaines et du système serveur de base.
- L'Internet Society (http://www.isoc.org) ensuite, qui est une association de droit américain également, mais dont la vocation semble être plus internationale et sur les intentions desquelles je ne reviendrai pas.
Sans entrer dans plus de détails sur ces associations, il est permis de s'interroger sur les possibles effets d'une gouvernance minimale de l'internet.
Les conséquences premières sont visibles à tout internaute qui s'est laissé aller à quelques explorations aléatoires sur le réseau : la liberté d'expression y est totale, avec ce que cela comporte comme avantages et comme abus.
Les enjeux d'une bonne gouvernance de l'internet sont donc de divers ordres. Au niveau éthique certainement, mais aussi au niveau du respect de la vie privée et de la sécurité (piratage).
On sait, par ailleurs, que la sécurisation de la signature en ligne est un problème étudié par le gouvernement fédéral, en particulier pour la délivrance de documents publics ?
La question qui se pose dès lors est celle du rôle que peut jouer la société civile wallonne pour contribuer à une gouvernance pertinente et efficace de l'internet.
Pourquoi la société civile ?
Parce que les questions qui se posent sont in fine des questions de société, des questions qui révèlent un besoin, si pas de refaire, du moins de repenser la société de l'information dans une phase de révolution technologique en cours.
Les pistes de recherche sur lesquelles cet atelier pourra déboucher ne peuvent être que des moteurs puissants pour la réflexion qui s'affirme ici.
Mesdames, Messieurs,
Votre travail, votre réflexion, vos conclusions ne peuvent constituer qu'un apport positif à l'inscription de la Wallonie dans l'ère des TIC.
Vous vous placez clairement dans l'optique d'une société de la connaissance de qualité et accessible à tous.
Le gouvernement wallon sera naturellement attentif à vos analyses.
Pour sa part, soucieux de poursuivre la mission qu'il s'est assignée dans ce cadre, le gouvernement wallon veut contribuer à développer le taux d'équipement de la Wallonie.
En effet, une étude récente de l'OCDE montre que la Belgique, malgré les efforts envisagés, reste à la traîne des pays de l'Europe en ce domaine.
Avec, entre autres, le projet "Cyber Ecole", avec l'attention que nous portons à l'extension du réseau des fibres optiques et à l'équipement des PME, j'ai dit tout à l'heure quelle était la voie sur laquelle s'engagerait clairement la Région wallonne avec le Contrat d'Avenir pour la Wallonie.
Mais nous aurons aussi à veiller à ce que le taux de pénétration des ménages suive cette courbe ascendante car ainsi, le gouvernement wallon contribuera à créer les conditions d'une accessibilité complète au réseau, pour le plus grand nombre de Wallons possible.
Mesdames, Messieurs,
Pour nous, les NTIC sont incontestablement une des données majeures d'une nouvelle approche globale du développement.
Elles le sont d'autant plus que ces nouvelles technologies sont prioritairement la cible favorite et le moyen d'expansion économique des nouvelles générations, la génération Internet.
Ce n'est pas par hasard si les jeunes sont une priorité pour le gouvernement wallon. Parce que c'est une nécessité absolue de rendre confiance en l'avenir à ceux qui en seront les forgerons et les artisans. Il y a cinq ans, Nicholas Negroponte, fondateur du prestigieux Medialab, disant dans Le Nouvel Observateur que le problème en Europe, c'est que vous ne prenez pas les jeunes assez au sérieux. C'est une des raisons pour lesquelles vous avez autant de retard dans les nouvelles technologies.
Nous avons retenu, en ce qui nous concerne, la leçon !
La Wallonie entre de plain pied dans la société de la connaissance.
Elle structure, fédère et réfléchit son action, notamment grâce à votre entremise.
Tout ceci est pour moi exceptionnellement réjouissant et réconfortant.
Page mise à jour le lundi 03 juillet 2000